Le 7 décembre 2020, la Préfecture du Bas-Rhin (Alsace) a annoncé l’arrêt définitif du projet de géothermie de la société Fonroche situé à Vendenheim, près de Strasbourg. Cette décision fait suite à une série de tremblements de terre ressentis par la population depuis fin octobre, dont le plus fort s’est produit le 4 décembre avec une de magnitude de 3,5.
Il est compréhensible que l’arrêt du projet de Vendenheim soit source d'incertitude. D’autant plus que cet échec s’inscrit dans une série d’autres projets de géothermie ayant provoqué des tremblements de terre fortement ressentis, comme à St-Gall, ou ayant causé des dommages, comme à Pohang, en Corée du Sud.
En quoi le projet de géothermie profonde de Haute-Sorne est-il différent ?
Les projets de géothermie profonde ont souvent pour objectif des grandes zones de failles. La raison en est simple : les zones de failles peuvent représenter un environnement géologique propice à
la circulation de l’eau chaude. Ce concept est appliqué en de nombreux endroits avec succès, notamment dans la Vallée du Rhin où 5 centrales de géothermie profonde fonctionnement aujourd’hui à
satisfaction. Mais les grandes failles sont également des zones de faiblesse dans la croûte terrestre qui, dans certaines conditions, peuvent se rompre et engendrer des séismes ressentis, voire
des dommages. Plusieurs cas, notamment à St-Gall en 2013, Pohang en 2017 et le récent séisme de Vendenheim, l’ont malheureusement rappelé.
A Haute-Sorne, Geo-Energie Suisse prévoit de mettre en œuvre son concept de réservoir stimulé par étapes. Ce concept prévoit que la circulation de l’eau entre deux forages sera établie grâce à la
stimulation hydraulique successive de petites portions du réservoir. Dans ce concept, les grandes zones de failles ne sont donc pas recherchées pour leur perméabilité, mais au contraire
soigneusement évitées dans le voisinage du réservoir afin de réduire le risque sismique. En Finlande, deux forages ont été stimulés avec cette technique à une profondeur de plus de 6 km en 2018
et 2020 sans que la sismicité induite ne pose de problème.
La sécurité avant tout
Le rapport du Service sismologique suisse commandé par le Gouvernement jurassien suite au tremblement de terre de Pohang et rendu public en avril 2020 a une fois de plus confirmé l’adéquation des
mesures de sécurité prévues pour le projet de Haute-Sorne et recommandé au Gouvernement d’autoriser le démarrage du projet. Dès l’été 2020, Geo-Energie Suisse a commencé à tester et valider son
concept de stimulation et les instruments de mesure de la sismicité dans le laboratoire souterrain de l’EPFZ du Val Bedretto (TI). Il est prévu de tester ensuite le concept à grande échelle dans
le projet de recherche sur les systèmes géothermiques stimulés FORGE, en Utah (USA), auquel Geo-Energie Suisse participe en tant que partenaire industriel. Ce sont ainsi des techniques et
méthodes éprouvées qui seront mises en œuvre à Haute-Sorne, par étapes et avec grande prudence.
De plus, la première phase du projet de Haute-Sorne est dédiée à l’exploration. En lien avec le premier forage, Geo-Energie Suisse prévoit notamment de réaliser des mesures géophysiques
permettant d’obtenir une image en 3D des structures du sous-sol et de révéler la présence éventuelle de failles. L’étude de risque sera mise à jour si une faille importante devait être mise en
évidence par les travaux de forage ou les mesures et les tests exhaustifs qui y seront réalisés. Cette réévaluation de la situation par Geo-Energie Suisse puis par le groupe d’experts mandatés
par le Gouvernement jurassien pourra mener à une modification du projet, voire à son abandon définitif.